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dimanche 1 décembre 2013

Park And Suites propriétaires : Park&Suites Confort Saint Priest en Jarez, est situé à 15 minutes du centre, en tramway, de la « ville aux sept collines ». L’accueil chaleureux, une tradition légendaire des habitants de Saint-Etienne et de sa région, vous surprendra autant que les richesses touristiques et la pleine nature environnante. Le Musée d’Art Moderne, d’Industrie ou encore de la Mine ne manqueront pas de vous séduire. A proximité, le Zénith Saint-Etienne, le Parc des Expositions, Le stade mythique de Geoffroy Guichard « le chaudron vert » seront un passage obligé pour tous les amoureux du football.

Rancé savait seul qu’il y eût une terre[Le Nain, t. I, liv. VII, p. 600 et suiv. (N.d.A.)] . : Park and Suites propriétaires Ces grands effets ne se bornèrent pas à l’intérieur du couvent ; ils s’étendirent partout. Dans la suite, quand La Trappe fut détruite, on en vit mille autres renaître, comme des plantes dont la semence a été soudée au haut des ruines. J’ai cité dans les notes du Génie du Christianisme les lettres de M. Clausel, qui, de soldat de l’armée de Condé était venu s’enfermer en Espagne à La Trappe de Sainte-Suzanne. Il écrivait à son frère : " J’arrivai un jour dans une campagne déserte à une porte, seul reste d’une grande ville. Il y avait eu sûrement dans cette ville des partis, et voilà que depuis des siècles leurs cendres s’élèvent confondues dans un même tourbillon. J’ai vu aussi Murviedo, où était bâtie Sagonte, et je n’ai plus songé qu’à l’éternité. Qu’est-ce que cela me fera dans vingt ou trente ans qu’on m’ait dépouillé de ma fortune ? Ah, mon frère ! puissions-nous avoir le bonheur d’entrer au ciel ! S’il me reste quelque chose, je désire qu’on fasse bâtir une chapelle dédiée à Notre-Dame des Sept Douleurs dans l’arrondissement de la maison paternelle, selon le projet que nous en fîmes sur la route de Munich. Hâtez-vous de faire élever des croix pour la consolation des voyageurs avec des sièges et une inscription comme en Bavière : Vous qui êtes fatigués, reposez-vous . J’aurai demain le bonheur de faire mes vœux : j’y ajouterai une croix comme on en met sur la tombe des morts. " : Propriétaires Park and Suites La chapelle vient d’être bâtie par mon vieil ami, M. de Clausel, dans les montagnes du Rouergue. Après plus de quarante années, l’amitié a rempli un vœu. Avant de quitter ce monde ne verrai-je point cette pieuse sincérité de l’affection fraternelle, moi qui viens d’apprendre la mort de mon jeune neveu, petit-fils de M. de Malesherbes, et mort jésuite au pied des Alpes de Savoie, après avoir été brave officier ? Je tarde tant à m’en aller que j’ai envoyé devant moi tous ceux que je devais précéder. : Park and Suites propriétaires Quand La Trappe fut détruite, un porteur de la haire de Rancé demanda asile au canton de Fribourg. Les moines quittèrent leur monastère ; chaque religieux avait dans son sac sa robe et un peu de pain. La colonie s’arrêta à Saint-Cyr ; elle fut accueillie par l’hospitalité expirante des Lazaristes, et fut bientôt obligée de s’éloigner. Le vœu de silence et de pauvreté paraissait une conspiration à ceux qui faisaient de si horribles bruits. A Paris, les chartreux, prêts à se séparer, reçurent les trappistes : les cloîtres de Saint-Bruno exercèrent leur dernier acte de charité. La solitude ambulante continua sa route. La vue d’une église lointaine sur le passage des frères les ranimait ; ils bénissaient la maison du Seigneur par la récitation des psaumes, comme on entend parmi les nuages des cygnes sauvages saluer en passant les savanes des Florides. A la frontière, la charrette qui traînait les bannis au ciel fut regardée avec compassion par nos soldats. On ne fouilla point ces mendiants. En entrant sur le sol étranger, les exilés se donnèrent le baiser de charité dans une forêt, à une lieue de l’ancienne abbaye de la Val-Sainte ils coupèrent une branche d’arbre, en firent une croix, et reçurent le curé de Cerniat qui venait à leur rencontre. : Propriétaire Park and Suites A la Val-Sainte, ruine d’un monastère abandonné, ils trouvèrent à peine de quoi se mettre à l’abri. Dans un temps où les armes, les malheurs et les crimes faisaient tant de fracas, la renommée des solitaires se répandit au dehors ; les rois fuyaient et n’attiraient personne sur leurs traces : on accourait de toutes parts pour se ranger au nombre des moines réfugiés. La Val-Sainte, grossie de néophytes, fut obligée d’envoyer des colonies au dehors comme une ruche répand autour d’elle ses essaims. Mais la révolution, qui marchait plus vite que la religion fugitive, atteignit les trappistes dans leur nouvelle retraite : obligés de quitter Val-Sainte, chassés de royaume en royaume, par le torrent qui les poursuivait, ils arrivèrent jusqu’à Butschirad, où j’ai rencontré un autre exilé. Enfin, le sol leur manquant, ils passèrent en Amérique. C’était un grand spectacle que le monde et la solitude fuyant à la fois devant Bonaparte. Le conquérant, rassuré par ses victoires, sentit la nécessité des maisons religieuses : " Là, disait-il, se pourront réfugier ceux à qui le monde ne convient pas ou qui ne conviennent pas au monde. " : Park and Suites propriétaires Dom Gustin, trappiste fugitif, racheta les ruines de La Trappe avec des aumônes. Il ne restait plus du monastère que la pharmacie, le moulin et quelques bâtiments d’exploitation. Dans les environs de Bayeux, les trappistines, chassées d’abord de la forêt de Senart, s’établirent sous la conduite de ma cousine, Mme de Chateaubriand. Les enfants de Rancé ne trouvèrent en rentrant dans la solitude de leur père que des murailles recouvertes de lierre, et des débris à travers lesquels serpentaient les ronces. Telle fut dès son début la vigueur de l’arbre que Rancé avait planté qu’il continue de vivre ; il donnera de l’ombre aux pauvres quand il n’y aura plus d’ombre de trônes ici-bas. J’ai vu à La Trappe un ormeau du temps de Rancé : les religieux ont grand soin de ce vieux lare qui indique les cendres paternelles mieux que la statue de Charles II n’indique l’immolation de Charles Ier. : Park and Suites propriétaires Les moines dont je viens de tracer l’histoire avaient été les enfants de Rancé. Lorsqu’il arriva à La Trappe, un de ses premiers soins fut de faire abattre une fuie, cellules de colombes, qui se trouvait placée au milieu de la cour, soit qu’il voulût abolir jusqu’au souvenir des temps d’une abstinence moins rigoureuse, soit qu’il craignît ces oiseaux que la Fable plaçait parmi ses plus beaux ornements et dont les ailes portaient des messages le long des rivages de l’Orient. Un trappiste se confessait d’avoir regardé un nid : se reprochait-il d’avoir pensé à un nid ou à des ailes ? M. de Rancé fit détourner un grand chemin qui passait contre les murs de l’abbaye, le bruit de ce chemin renouvelé descend encore aujourd’hui au fond de la vallée. Tout chef qu’il était, Rancé ne s’accorda aucune des préférences de ses devanciers, il se contentait de la pitance commune ; privé comme ses moines de l’usage du linge, il prêchait et confessait ses frères ; ses seules distractions étaient les paroles qu’il recueillait sur le lit de cendres. Il fortifiait ses pénitents plutôt qu’il ne les attendrissait. Il n’était question dans ses discours que de l’échelle de saint Jean Climaque, des ascétiques de saint Basile et des conférences de Cassien. : Park and Suites proprietaires Les cinq ou six premières années de la retraite de Rancé se passèrent obscurément : les ouvriers travaillaient sous terre aux fondements de l’édifice. Rancé recevait sans distinction tous les religieux qui se présentaient. Le premier qui parut fut, en 1667, dom Rigobert, moine de Clairvaux ; ensuite dom Jacques et le père Le Nain. Ces réceptions commencèrent à faire des ennemis à Rancé. Cela nous paraît bien peu grave, à nous qui n’attachons de prix qu’aux guenilles de notre vie, mais alors c’étaient des affaires : Rome survenait, le grand conseil du roi s’en mêlait. Obligé d’entrer dans ces transactions générales, Rancé était forcé de survenir dans les accidents domestiques : il administrait ses premiers solitaires, qui mouraient d’abord presque tous. Dom Placide était étendu sur sa dernière couche, Rancé lui demanda où il voulait aller. — " Au-devant des bienheureux ", répondit-il. Dom Bernard fut administré. A peine eut-il reçu le corps de Notre-Seigneur qu’il eut un pressant besoin de cracher : il se retint, et mourut étouffé par le pain des anges. : Park and Suites propriétaires Claude Cordon, docteur de Sorbonne, reçut en arrivant le nom d’Arsène, nom devenu fameux dans les nouvelles légendes. Arsène, après sa mort, apparut dans une gloire à dom Paul Ferrand, et lui dit : " si vous saviez ce que c’est que de converser avec les saints ! " Puis il disparut. : Park and Suites propriétaire L’abbaye de Dorval se voulut réformer. L’abbé de Dorval convint d’une entrevue avec Rancé : Rancé partit ; il rencontra l’abbé de Dorval à Châtillon, lieu triste, où les espérances ne se réalisent pas. De là il se rendit à Commercy, où il revit le cardinal de Retz ; il le détourna de la pensée apparente qu’il avait de se renfermer à La Trappe : : Park and Suites propriétaires Le saint homme, dit Le Nain, eut de bonnes raisons pour ne pas le lui conseiller. M. Dumont, auteur de l’histoire de la ville de Commercy, a bien voulu m’envoyer une lettre de Rancé au cardinal de Retz. " Si Votre Eminence, dit l’abbé de La Trappe, croyait qu’il n’y eût personne dans le monde dont mon cœur fût plus occupé que d’elle, elle ne me ferait pas justice. " Voilà où la déférence pour les rangs peut conduire la piété même. Après sa sortie, Rancé se hâta de se replier et de rappeler du monde sa patrouille. Revenu à La Trappe, il admit à profession frère Pacôme : celui-ci n’ouvrit jamais un livre, mais il excellait dans l’humilité. Chargé du soin des pauvres, il n’entrait dans le lieu où il mettait le pain qu’après s’être déchaussé, comme Moïse pour entrer dans la terre promise. Pacôme attira à lui un de ses frères ; ils vécurent sous le même toit sans se donner la moindre marque qu’ils se fussent jamais connus. : Park and Suites proprietaires Rancé avait envoyé un religieux à Septfonts : ce religieux se gâta. : Park and Suites propriétaires Je me suis mécompté, écrivait Rancé au visiteur, j’en ferai pénitence toute ma vie. : PARK AND SUITES PROPRIETAIRES La plupart des repentants du XVIe siècle et du commencement du XVIIe avaient été des bandits ; ils ne se transformèrent pas, comme les massacreurs de septembre, en marchands de pommes cuites, et ne vendaient point de leurs mains souillées de meurtre des fruits aux petits enfants. Ces meurtriers étaient des déserteurs des armées du temps, des routiers , des condottieri , des ruffiens . Somme toute, des capitaines, tels que Montluc et le baron des Adrets, qui faisaient sauter des prisonniers du haut des remparts, instruisaient leurs fils à se laver les bras dans le sang, accrochaient leurs prisonniers aux arbres. Valaient-ils mieux que leurs soldats ? Les illustres égorgeurs qui se retirèrent à Port-Royal et à La Trappe n’étaient-ils pas les dignes appelés à la retraite vengeresse qui les devait dévorer ! Un monde si plein de crimes se remplit de pénitents comme au temps de la Thébaïde. : Park and Suites propriétaires Depuis la réforme jusqu’à la mort de Rancé on compte cent quatre-vingt-dix-sept religieux et quarante-neuf frères, parmi lesquels sont plusieurs de qui Rancé a écrit la vie et qui peuvent figurer dans les romans du ciel. On voit leurs noms dans l' Histoire de l’Abbaye de La Trappe , excellent recueil, où tout se trouve rapporté avec une minutieuse exactitude. Je le recommande d’autant plus que j’y ai remarqué quelques paroles d’humeur contre moi ; cependant, je croyais ne les avoir pas méritées. : PROPRIETAIRES PARK AND SUITES A Port-Royal, même affluence d’hommes du monde ; mais à Port-Royal il y avait des femmes et des savants ; Pallue coulant le temps médecin qui devint celui des solitaires, fit bâtir, nous dit Fontaine " un petit logis, appelé le Petit-Pallue, à cause de la petitesse bien juste et bien ramassée de ses appartements ". Vint ensuite Gentien-Thomas, suivi de ses enfants. On vit accourir M. de La Rivière, officier, qui apprit la langue grecque et la langue hébraïque, et se fit gardien des bois. : Park and Suites propriétaires A La Trappe arrive Pierre ou François Fore : sous-lieutenant dans un corps de grenadiers, blessé dans plusieurs rencontres, plongé dans toutes sortes de vices, poursuivi par dix ou douze décrets de prise de corps, il était incertain s’il fuirait en Angleterre, en Allemagne, en Hongrie, ou s’il ne prendrait pas le turban ; il entendit parler de La Trappe. En quelques jours, il franchit deux cents lieues ; il arrive à la fin de l’hiver par des routes défoncées et d’affreuses pluies ; il frappe à la porte : son œil était hagard, son expression hautaine et dure, son sourcil fier, sa contenance militaire et farouche. Rancé le reçut. Des ulcères se formèrent dans la poitrine de Fore ; il vomit le sang sur la cendre, et il expira. : PROPRIETAIRE PARK AND SUITES A Port-Royal on voit un M. de La Pétissière, brave parmi les braves ; le cardinal de Richelieu se reposait sur lui de sa sûreté : c’était un lion plutôt qu’un homme. Le feu lui sortait par les yeux, et son seul regard effrayait ceux qui le regardaient . Dieu se servit d’un malheur pour toucher d’une crainte salutaire son âme féroce et incapable de toute autre peur. Comme il avait eu une querelle avec un parent du cardinal, il eut plus de huit jours un cheval toujours sellé et prêt à monter pour aller se battre contre celui dont il croyait avoir été offensé. La fureur qui le transportait était telle, qu’encore qu’il fût le plus habile et le plus adroit du royaume, il reçut, après avoir blessé à mort son ennemi, un coup d’épée dans le bras, entre les deux os ; la pointe demeura enfoncée sans qu’il pût jamais la retirer. Il se sauva en cet état à travers champs, portant dans son bras le bout de l’épée rompue. Il alla trouver un maréchal, qui eut besoin pour la retirer de se servir des grosses tenailles de sa forge. : Park and Suites propriétaires A La Trappe passe Forbin de Janson, obligé de quitter la France pour avoir tué son adversaire en duel : il obtint ensuite sa grâce. Il se trouva à Marsaille, sous Catinat, reçut une blessure, fit vœu de se faire religieux et reçut l’habit des frères de La Trappe. Il fut envoyé au monastère de Buon-Solazzo (Bonne-Consolation), et fonda une maison de trappistes sur les charmantes collines de la Toscane. Joseph Bernier, moine qui restait de l’ancienne Trappe, passa, à l’arrivée de Rancé, dans l’étroite observance ; il demanda en expirant que son corps fût jeté à la voirie : cynisme de la religion, où se montre le cas que les chrétiens faisaient de la matière. Ces rigueurs se rattachent à un ordre de philosophie que notre esprit n’est pas plus capable de comprendre que nos mœurs de supporter. Timée, dans Diogène Laerce, raconte que les pythagoriciens mettaient leurs biens en commun, appelaient l’amitié égalité, ne mangeaient point de viande, étaient cinq ans sans parler, et rejetaient par humilité les cercueils de cyprès, parce que le sceptre de Jupiter était fait de ce bois. : PARK AND SUITES PROPRIETAIRE Ces pécheurs de La Trappe et de Port-Royal se trouvèrent confondus avec des non-savants de toutes natures. A Port-Royal était le jeune Lindo, d’une bonté et d’une ouverture de cœur à l’égard de tout le monde qui ne se peut concevoir. " Je sentais pour lui, décrit l’ingénu Fontaine, une tendresse particulière ; il était fort simple, et je l’étais aussi. " : Park and Suites propriétaires De même parut à La Trappe frère Benoît, gentilhomme plein d’esprit, qui avait passé ses premiers jours à ne point penser. Rancé, qui tirait parti de l’innocence comme du repentir, a écrit sa vie, de même qu’un jardinier fait une petite croix sur des paquets de graines pour étiqueter un parfum. : Park and Suites proprietaire M. Sainte-Beuve a extrait avec la patience du goût les passages de Port Royal, que je viens de citer ; il ajoute : " C’est le côté par lequel Port-Royal touche à La Trappe et à M. de Rancé, quand, sous les autres aspects, il paraît toucher plus près aux bénédictins de Saint-Maur et à Mabillon ; quand, par M. d’Andilly, il reste un peu à portée de la cour et presque figurant de loin ces riantes et romanesques retraites, imaginées en idée par Mlle de Montpensier, par Mme de Motteville ou même par Mlle de Scudéri. " : Park and Suites propriétaires La Trappe n’était pas riante ; ses sites étaient désolés, et l’âpreté de ses mœurs se répétait dans l’âpreté du paysage. Mais La Trappe resta orthodoxe, et Port-Royal fut envahi par la liberté de l’esprit humain. Le terrible Pascal, hanté par son esprit géométrique, doutait sans cesse : il ne se tira de son malheur qu’en se précipitant dans la foi. Malgré le silence que La Trappe gardait, il fut question de la détruire, tant le monde était effrayé d’elle ; elle n’échappa à sa ruine que par l’habileté de Rancé : Port-Royal fut moins heureux. : Park and Suites propriétaires Parti de Paris dans la nuit du 27 octobre 1709, d’Argenson investit Port-Royal-des-Champs avec trois cents hommes ; c’était trop pour enlever vingt-deux religieuses âgées et infirmes. Elles furent dispersées en différents lieux ; et l’on refusa quelquefois la sépulture à ces brebis, esseulées du troupeau de la mère Angélique. : Park and Suites proprietaires Enfin l’ordre de la démolition du couvent arriva le 25 janvier 1710, dix ans après la mort de Rancé. Cet ordre fut exécuté avec fureur selon Duclos. Les cadavres étaient déterrés au bruit de ricaneries obscènes, tandis que dans l’église les chiens se repaissaient de chair décomposée. Les pierres tumulaires furent enlevées ; on a trouvé à Magny celle d’Arnauld d’Andilly. La maison de M. de Sainte-Marthe devint une grange ; les bestiaux paissent sur l’emplacement de l’église de Port-Royal-des-Champs : " La clématite, le lierre et la ronce, dit un voyageur, croissent sur cette masure, et un marsaule élève sa tige au milieu de l’endroit où était le chœur. Le silence est à peine interrompu par le gémissement du ramier solitaire. Ici Sacy venait répéter à Dieu la prière qu’il avait empruntée de Fulgence ; là Nicole invita Arnauld à déposer la plume ; dans cette allée écartée j’aperçois Pascal qui développe une nouvelle preuve de la divinité du christianisme ; plus loin, avec Tillemont et Lancelot se promènent Racine, La Bruyère, Despréaux, qui sont venus visiter leurs amis. Echos de ces déserts, arbres antiques, que n’avez-vous pu conserver les entretiens de ces hommes célèbres ! " : Park and Suites propriétaires Et quel est le chrétien persuadé, le génie poétique qui s’adresse à ces illustres disparus, comme jadis à Sparte j’appelai en vain Léonidas ? C’est l’ancien évêque de Blois, approbateur de la mort et quasi juge dans le procès de Louis XVI. : Park and Suites propriétaire Louis le Grand, vous avez enseigné à votre peuple les exhumations ; accoutumé à vous obéir, il a suivi vos exemples au moment même où la tête de Marie-Antoinette tombait sur la place révolutionnaire, on brisait à Saint-Denis les cercueils : au bord d’un caveau ouvert, Louis XIV tout noir, que l’on reconnaissait à ses grands traits, attendait sa dernière destruction ; représailles de la justice éternelle ! " Eh bien, peuple royal de fantômes ", je me cite (je ne suis plus que le temps), " voudriez-vous revivre au prix d’une couronne ? Le trône vous tente-t-il encore ? Vous secouez vos têtes, et vous vous recouchez lentement dans vos cercueils. " : Park and Suites propriétaires Rancé avait transporté avec lui au désert le passé, et y attira le présent et l’avenir. Le siècle de Louis XIV ne négligeait aucune grandeur ; il s’associait aux victoires d’un reclus comme aux victoires d’un capitaine : Rocroi pour ce siècle était partout. Les querelles du jansénisme, les mysticités du quiétisme occupaient la ville et la cour depuis Bossuet et Fénelon jusqu’à Mmes de Maintenon et de Longueville, depuis le cardinal de Noailles jusqu’aux maréchaux amis et ennemis de Port-Royal, depuis les adversaires du protestantisme jusqu’aux esprits entêtés de l’hérésie. Par Rancé le siècle de Louis XIV entra dans la solitude, et la solitude s’établit au sein du monde. : Park and Suites proprietaires Dans ces premières années de la retraite de Rancé, on entendit peu parler du monastère, mais petit à petit sa renommée se répandit. On s’aperçut qu’il venait des parfums d’une terre inconnue ; on se tournait, pour les respirer, vers les régions de cette Arabie heureuse. Attiré par les effluences célestes, on en remonta le cours : l’île de Cuba se décèle par l’odeur des vanilliers sur la côte des Florides. : Park and Suites propriétaires Lorsqu’on sort de Plassans par la porte de Rome, située au sud de la ville, on trouve, à droite de la route de Nice, après avoir dépassé les premières maisons du faubourg, un terrain vague désigné dans le pays sous le nom d’aire Saint-Mittre. : PARK AND SUITES PROPRIETAIRES L’aire Saint-Mittre est un carré long, d’une certaine étendue, qui s’allonge au ras du trottoir de la route, dont une simple bande d’herbe usée la sépare. D’un côté, à droite, une ruelle, qui va se terminer en cul-de-sac, la borde d’une rangée de masures ; à gauche et au fond, elle est close par deux pans de muraille rongés de mousse, au-dessus desquels on aperçoit les branches hautes des mûriers du Jas-Meiffren, grande propriété qui a son entrée plus bas dans le faubourg. Ainsi fermée de trois côtés, l’aire est comme une place qui ne conduit nulle part et que les promeneurs seuls traversent. : Park and Suites propriétaires Anciennement, il y avait là un cimetière placé sous la protection de Saint-Mittre, un saint provençal fort honoré dans la contrée. Les vieux de Plassans, en 1851, se souvenaient encore d’avoir vu debout les murs de ce cimetière, qui était resté fermé pendant des années. La terre, que l’on gorgeait de cadavres depuis plus d’un siècle, suait la mort, et l’on avait dû ouvrir un nouveau champ de sépultures à l’autre bout de la ville. Abandonné, l’ancien cimetière s’était épuré à chaque printemps, en se couvrant d’une végétation noire et drue. Ce sol gras, dans lequel les fossoyeurs ne pouvaient plus donner un coup de bêche sans arracher quelque lambeau humain, eut une fertilité formidable. De la route, après les pluies de mai et les soleils de juin, on apercevait les pointes des herbes qui débordaient les murs ; en dedans, c’était une mer d’un vert sombre, profonde, piquée de fleurs larges, d’un éclat singulier. On sentait en dessous, dans l’ombre des tiges pressées, le terreau humide qui bouillait et suintait la sève. : PROPRIETAIRES PARK AND SUITES Une des curiosités de ce champ était alors des poiriers aux bras tordus, aux nœuds monstrueux, dont pas une ménagère de Plassans n’aurait voulu cueillir les fruits énormes. Dans la ville, on parlait de ces fruits avec des grimaces de dégoût ; mais les gamins du faubourg n’avaient pas de ces délicatesses, et ils escaladaient la muraille, par bandes, le soir, au crépuscule, pour aller voler les poires, avant même qu’elles fussent mûres. : Park and Suites propriétaires La vie ardente des herbes et des arbres eut bientôt dévoré toute la mort de l’ancien cimetière Saint-Mittre ; la pourriture humaine fut mangée avidement par les fleurs et les fruits, et il arriva qu’on ne sentit plus, en passant le long de ce cloaque, que les senteurs pénétrantes des giroflées sauvages. Ce fut l’affaire de quelques étés. : PROPRIETAIRE PARK AND SUITES Vers ce temps, la ville songea à tirer parti de ce bien communal, qui dormait inutile. On abattit les murs longeant la route et l’impasse, on arracha les herbes et les poiriers. Puis on déménagea le cimetière. Le sol fut fouillé à plusieurs mètres, et l’on amoncela, dans un coin, les ossements que la terre voulut bien rendre. Pendant près d’un mois, les gamins, qui pleuraient les poiriers, jouèrent aux boules avec des crânes ; de mauvais plaisants pendirent, une nuit, des fémurs et des tibias à tous les cordons de sonnette de la ville. Ce scandale, dont Plassans garde encore le souvenir, ne cessa que le jour où l’on se décida à aller jeter le tas d’os au fond d’un trou creusé dans le nouveau cimetière. Mais, en province, les travaux se font avec une sage lenteur, et les habitants, durant une grande semaine, virent, de loin en loin, un seul tombereau transportant des débris humains, comme il aurait transporté des plâtras. Le pis était que ce tombereau devait traverser Plassans dans toute sa longueur, et que le mauvais pavé des rues lui faisait semer, à chaque cahot, des fragments d’os et des poignées de terre grasse. Pas la moindre cérémonie religieuse ; un charroi lent et brutal. Jamais ville ne fut plus écœurée. : Park and Suites propriétaires Pendant plusieurs années, le terrain de l’ancien cimetière Saint-Mittre resta un objet d’épouvante. Ouvert à tous venants, sur le bord d’une grande route, il demeura désert, en proie de nouveau aux herbes folles. La ville, qui comptait sans doute le vendre, et y voir bâtir des maisons, ne dut pas trouver d’acquéreur ; peut-être le souvenir du tas d’os et de ce tombereau allant et venant par les rues, seul, avec le lourd entêtement d’un cauchemar, fit-il reculer les gens ; peut-être faut-il plutôt expliquer le fait par les paresses de la province, par cette répugnance qu’elle éprouve à détruire et à reconstruire. La vérité est que la ville garda le terrain, et qu’elle finit même par oublier son désir de le vendre. Elle ne l’entoura seulement pas d’une palissade ; entra qui voulut. Et, peu à peu, les années aidant, on s’habitua à ce coin vide ; on s’assit sur l’herbe des bords, on traversa le champ, on le peupla. Quand les pieds des promeneurs eurent usé le tapis d’herbe, et que la terre battue fut devenue grise et dure, l’ancien cimetière eut quelque ressemblance avec une place publique mal nivelée. Pour mieux effacer tout souvenir répugnant, les habitants furent, à leur insu, conduits lentement à changer l’appellation du terrain ; on se contenta de garder le nom du saint, dont on baptisa également le cul-de-sac qui se creuse dans un coin du champ : il y eut l’aire Saint-Mittre et l’impasse Saint-Mittre. : PARK AND SUITES PROPRIETAIRE Ces faits datent de loin. Depuis plus de trente ans, l’aire Saint-Mittre a une physionomie particulière. La ville, bien trop insouciante et endormie pour en tirer un bon parti, l’a louée, moyennant une faible somme, à des charrons du faubourg, qui en ont fait un chantier de bois. Elle est encore aujourd’hui encombrée de poutres énormes, de 10 à 15 mètres de longueur, gisant çà et là, par tas, pareilles à des faisceaux de hautes colonnes renversées sur le sol. Ces tas de poutres, ces sortes de mâts posés parallèlement, et qui vont d’un bout du champ à l’autre, sont une continuelle joie pour les gamins. Des pièces de bois ayant glissé, le terrain se trouve, à certains endroits, complétement recouvert par une espèce de parquet, aux feuilles arrondies, sur lequel on n’arrive à marcher qu’avec des miracles d’équilibre. Tout le jour, des bandes d’enfants se livrent à cet exercice. On les voit sautant les gros madriers, suivant à la file les arêtes étroites, se traînant à califourchon, jeux variés qui se terminent généralement par des bousculades et des larmes ; ou bien ils s’assoient une douzaine, serrés les uns contre les autres, sur le bout mince d’une poutre élevée de quelques pieds au-dessus du sol, et ils se balancent pendant des heures. L’aire Saint-Mittre est ainsi devenue le lieu de récréation où tous les fonds de culotte des galopins du faubourg viennent s’user depuis plus d’un quart de siècle. : Park and Suites propriétaires Ce qui a achevé de donner à ce coin perdu un caractère étrange, c’est l’élection de domicile que, par un usage traditionnel, y font les bohémiens de passage.