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dimanche 1 décembre 2013
Park and suites propriétaires:Au cœur du XIIIème arrondissement, l'appart-hotel Park&Suites Prestige Paris est idéalement situé à 100 m de l'arrêt de tramway "Avenue de France" (ligne 3A, 25 minutes pour se rendre au Parc des Expositions Porte de Versailles), de la station de métro "Bibliothèque François Mittérand", du RER et à proximité de tous les autres moyens de transports (bus, train, vélib'). Le quartier est très vivant et possède une architecture exceptionnelle : la Grande Bibliothèque Nationale de France, le Parc Omnisport de Bercy, Bercy Village...
Quand il voulut compter avec lui, Aristide
chercha tant de chicanes, qu’il dut le laisser partir sans lui retenir
un sou pour ses frais de nourriture et de logement. Le ménage alla
s’établir à quelques pas, sur une petite place du vieux quartier,
nommée la place Saint-Louis. Les dix mille francs furent vite mangés.
Il fallut s’établir. Aristide, d’ailleurs, ne changea rien à sa vie,
tant qu’il y eut de l’argent à la maison. Lorsqu’il en fut à son
dernier billet de cent francs, il devint nerveux. On le vit rôder dans
la ville d’un air louche ; il ne prit plus sa demi-tasse au cercle ; il
regarda jouer, fiévreusement, sans toucher une carte. La misère le
rendit pire encore qu’il n’était. Longtemps, il tint le coup, il
s’entêta à ne rien faire. Il eut un enfant, en 1840, le petit Maxime,
que sa grand’mère Félicité fit heureusement entrer au collège, et dont
elle paya secrètement la pension. C’était une bouche de moins chez
Aristide ; mais la pauvre Angèle mourait de faim, le mari dut enfin
chercher une place. Il réussit à entrer à la sous-préfecture. Il y
resta près de dix années, et n’arriva qu’aux appointements de dix-huit
cents francs. Dès lors, haineux, amassant le fiel, il vécut dans
l’appétit continuel des jouissances dont il était sevré. Sa position
infime l’exaspérait ; les misérables cent cinquante francs qu’on lui
mettait dans la main, lui semblaient une ironie de la fortune. Jamais
pareille soif d’assouvir sa chair ne brûla un homme. Félicité, à
laquelle il contait ses souffrances, ne fut pas fâchée de le voir
affamé ; elle pensa que la misère fouetterait ses paresses. L’oreille
au guet, en embuscade, il se mit à regarder autour de lui, comme un
voleur qui cherche un bon coup à faire. Au commencement de l’année
1848, lorsque son frère partit pour Paris, il eut un instant l’idée de
le suivre. Mais Eugène était garçon ; lui ne pouvait traîner sa femme
si loin, sans avoir en poche une forte somme. Il attendit, flairant une
catastrophe, prêt à étrangler la première proie venue. : PROPRIETAIRE PARK AND SUITES
L’autre fils Rougon, Pascal, celui qui était né entre Eugène et
Aristide, ne paraissait pas appartenir à la famille. C’était un de ces
cas fréquents qui font mentir les lois de l’hérédité. La nature donne
souvent ainsi naissance, au milieu d’une race, à un être dont elle
puise tous les éléments dans ses forces créatrices. Rien au moral ni au
physique ne rappelait les Rougon chez Pascal. Grand, le visage doux et
sévère, il avait une droiture d’esprit, un amour de l’étude, un besoin
de modestie, qui contrastaient singulièrement avec les fièvres
d’ambition et les menées peu scrupuleuses de sa famille. Après avoir
fait à Paris d’excellentes études médicales, il s’était retiré à
Plassans par goût, malgré les offres de ses professeurs. Il aimait la
vie calme de la province ; il soutenait que cette vie est préférable
pour un savant au tapage parisien. Même à Plassans, il ne s’inquiéta
nullement de grossir sa clientèle. Très-sobre, ayant un beau mépris
pour la fortune, il sut se contenter des quelques malades que le hasard
seul lui envoya. Tout son luxe consista dans une petite maison claire
de la ville neuve, où il s’enfermait religieusement, s’occupant avec
amour d’histoire naturelle. Il se prit surtout d’une belle passion pour
la physiologie. On sut dans la ville qu’il achetait souvent des
cadavres au fossoyeur de l’hospice, ce qui le fit prendre en horreur
par les dames délicates et certains bourgeois poltrons. On n’alla pas
heureusement jusqu’à le traiter de sorcier ; mais sa clientèle se
restreignit encore, on le regarda comme un original auquel les
personnes de la bonne société ne devaient pas confier le bout de leur
petit doigt, sous peine de se compromettre. On entendit la femme du
maire dire un jour : : Park and Suites proprietaires
— J’aimerais mieux mourir que de me faire soigner par ce monsieur. Il sent le mort. : Park and Suites propriétaires
Pascal, dès lors, fut jugé. Il parut heureux de cette peur sourde qu’il
inspirait. Moins il avait de malades, plus il pouvait s’occuper de ses
chères sciences. Comme il avait mis ses visites à un prix très-modique,
le peuple lui demeurait fidèle. Il gagnait juste de quoi vivre, et
vivait satisfait, à mille lieues des gens du pays, dans la joie pure de
ses recherches et de ses découvertes. De temps à autre, il envoyait un
mémoire à l’Académie des sciences de Paris. Plassans ignorait
absolument que cet original, ce monsieur qui sentait le mort, fût un
homme très-connu et très-écouté du monde savant. Quand on le voyait, le
dimanche, partir pour une excursion dans les collines des Garrigues,
une boîte de botaniste pendue au cou et un marteau de géologue à la
main, on haussait les épaules, on le comparait à tel autre docteur de
la ville, si bien cravaté, si mielleux avec les dames, et dont les
vêtements exhalaient toujours une délicieuse odeur de violette. Pascal
n’était pas davantage compris par ses parents. Lorsque Félicité lui vit
arranger sa vie d’une façon si étrange et si mesquine, elle fut
stupéfaite et lui reprocha de tromper ses espérances. Elle qui tolérait
les paresses d’Aristide, qu’elle croyait fécondes, ne put voir sans
colère le train médiocre de Pascal, son amour de l’ombre, son dédain de
la richesse, sa ferme résolution de rester à l’écart. Certes, ce ne
serait pas cet enfant qui contenterait jamais ses vanités ! : PARK AND SUITES PROPRIETAIRES
— Mais d’où sors-tu ? lui disait-elle parfois. Tu n’es pas à nous. Vois
tes frères, ils cherchent, ils tâchent de tirer profit de l’instruction
que nous leur avons donnée. Toi, tu ne fais que des sottises. Tu nous
récompenses bien mal, nous qui nous sommes ruinés pour t’élever. Non,
tu n’es pas à nous. : Park and Suites propriétaires
Pascal, qui préférait rire chaque fois qu’il avait à se fâcher, répondait gaiement, avec une fine ironie : : PROPRIETAIRES PARK AND SUITES
— Allons, ne vous plaignez pas, je ne veux point vous faire entièrement
banqueroute : je vous soignerai tous pour rien, quand vous serez
malades. : Park and Suites propriétaires
D’ailleurs, il voyait sa famille rarement, sans afficher la moindre
répugnance, obéissant malgré lui à ses instincts particuliers. Avant
qu’Aristide fût entré à la sous-préfecture, il vint plusieurs fois à
son secours. Il était resté garçon. Il ne se douta seulement pas des
graves événements qui se préparaient. Depuis deux ou trois ans, il
s’occupait du grand problème de l’hérédité, comparant les races
animales à la race humaine, et il s’absorbait dans les curieux
résultats qu’il obtenait. Les observations qu’il avait faites sur lui
et sur sa famille, avaient été comme le point de départ de ses études.
Le peuple comprenait si bien, avec son intuition inconsciente, à quel
point il différait des Rougon, qu’il le nommait M. Pascal, sans jamais
ajouter son nom de famille. : PROPRIETAIRE PARK AND SUITES
Trois ans avant la révolution de 1848, Pierre et Félicité quittèrent
leur maison de commerce. L’âge venait, ils avaient tous deux dépassé la
cinquantaine, ils étaient las de lutter. Devant leur peu de chance, ils
eurent peur de se mettre absolument sur la paille, s’ils s’entêtaient.
Leurs fils, en trompant leurs espérances, leur avaient porté le coup de
grâce. Maintenant qu’ils doutaient d’être jamais enrichis par eux, ils
voulaient au moins se garder un morceau de pain pour leurs vieux jours.
Ils se retiraient avec une quarantaine de mille francs, au plus. Cette
somme leur constituait une rente de deux mille francs, juste de quoi
vivre la vie mesquine de province. Heureusement, ils restaient seuls,
ayant réussi à marier leurs filles, Marthe et Sidonie, dont l’une était
fixée à Marseille et l’autre à Paris. : Park and Suites propriétaires
En liquidant, ils auraient bien voulu aller habiter la ville neuve, le
quartier des commerçants retirés ; mais ils n’osèrent. Leurs rentes
étaient trop modiques ; ils craignirent d’y faire mauvaise figure. Par
une sorte de compromis, ils louèrent un logement rue de la Banne, la
rue qui sépare le vieux quartier du quartier neuf. Leur demeure se
trouvant dans la rangée de maisons qui bordent le vieux quartier, ils
habitaient bien encore la ville de la canaille ; seulement ils voyaient
de leurs fenêtres, à quelques pas, la ville des gens riches ; ils
étaient sur le seuil de la terre promise. : PARK AND SUITES PROPRIETAIRE
Leur logement, situé au deuxième étage, se composait de trois grandes
pièces ; ils en avaient fait une salle à manger, un salon et une
chambre à coucher. Au premier, demeurait le propriétaire, un marchand
de cannes et de parapluies, dont le magasin occupait le
rez-de-chaussée. La maison, étroite et peu profonde, n’avait que deux
étages. Quand Félicité emménagea, elle eut un affreux serrement de
cœur. Demeurer chez les autres, en province, est un aveu de pauvreté.
Chaque famille bien posée à Plassans a sa maison, les immeubles s’y
vendant à très-bas prix. Pierre tint serrés les cordons de sa bourse ;
il ne voulut pas entendre parler d’embellissements ; l’ancien mobilier,
fané, usé, éclopé, dut servir sans être seulement réparé. Félicité, qui
sentait vivement, d’ailleurs, les raisons de cette ladrerie, s’ingénia
pour donner un nouveau lustre à toutes ces ruines ; elle recloua
elle-même certains meubles plus endommagés que les autres ; elle
reprisa le velours éraillé des fauteuils. : Park and Suites propriétaires
La salle à manger, qui se trouvait sur le derrière, ainsi que la
cuisine, resta presque vide ; une table et une douzaine de chaises se
perdirent dans l’ombre de cette vaste pièce, dont la fenêtre s’ouvrait
sur le mur gris d’une maison voisine. Comme jamais personne n’entrait
dans la chambre à coucher, Félicité y avait caché les meubles hors de
service ; outre le lit, une armoire, un secrétaire et une toilette, on
y voyait deux berceaux mis l’un sur l’autre, un buffet dont les portes
manquaient, et une bibliothèque entièrement vide, ruines respectables
que la vieille femme n’avait pu se décider à jeter. Mais tous ses soins
furent pour le salon. Elle réussit presque à en faire un lieu
habitable. Il était garni d’un meuble de velours jaunâtre, à fleurs
satinées. Au milieu se trouvait un guéridon à tablette de marbre ; des
consoles, surmontées de glaces, s’appuyaient aux deux bouts de la
pièce. Il y avait même un tapis qui ne couvrait que le milieu du
parquet, et un lustre garni d’un étui de mousseline blanche que les
mouches avaient piqué de chiures noires. Aux murs étaient pendues six
lithographies représentant les grandes batailles de Napoléon. Cet
ameublement datait des premières années de l’Empire. Pour tout
embellissement, Félicité obtint qu’on tapissât la pièce d’un papier
orange à grands ramages. Le salon avait ainsi pris une étrange couleur
jaune qui l’emplissait d’un jour faux et aveuglant ; le meuble, le
papier, les rideaux de fenêtre étaient jaunes ; le tapis et jusqu’aux
marbres du guéridon et des consoles tiraient eux-mêmes sur le jaune.
Quand les rideaux étaient fermés, les teintes devenaient cependant
assez harmonieuses, le salon paraissait presque propre. Mais Félicité
avait rêvé un autre luxe. Elle voyait avec un désespoir muet cette
misère mal dissimulée. D’habitude, elle se tenait dans le salon, la
plus belle pièce du logis. Une de ses distractions les plus douces et
les plus amères à la fois, était de se mettre à l’une des fenêtres de
cette pièce, qui donnaient sur la rue de la Banne. Elle apercevait de
biais la place de la Sous-Préfecture. C’était là son paradis rêvé.
Cette petite place, nue, proprette, aux maisons claires, lui semblait
un Éden. Elle eût donné dix ans de sa vie pour posséder une de ces
habitations. La maison qui formait le coin de gauche, et dans laquelle
logeait le receveur particulier, la tentait surtout furieusement. Elle
la contemplait avec des envies de femme grosse. Parfois, lorsque les
fenêtres de cet appartement étaient ouvertes, elle apercevait des coins
de meubles riches, des échappées de luxe qui lui tournaient le sang. : Park and Suites proprietaire
À cette époque, les Rougon traversaient une curieuse crise de vanité et
d’appétits inassouvis. Leurs quelques bons sentiments s’aigrissaient.
Ils se posaient en victimes du guignon, sans résignation aucune, plus
âpres et plus décidés à ne pas mourir avant de s’être contentés. Au
fond, ils n’abandonnaient aucune de leurs espérances, malgré leur âge
avancé ; Félicité prétendait avoir le pressentiment qu’elle mourrait
riche. Mais chaque jour de misère leur pesait davantage.